samedi 11 décembre 2010

Tirer le plein potentiel de la pêche au homard

Tirer le plein potentiel de la pêche au homard
Publié à 6h00 le jeudi 9 décembre 2010
Le Conseil du homard du Canada a dévoilé récemment un rapport sur la viabilité de l'industrie canadienne du homard. Le document dresse le portrait d'une industrie en détérioration et recommande plusieurs changements afin de réorganiser l'industrie, la rendre plus efficace et surtout plus rentable.


Le rapport, préparé par un groupe de consultants indépendants, constate que le plus grand problème de l'industrie canadienne du homard est sa fragmentation. Ainsi, même s'ils bénéficient d'une ressource intéressante, les pêcheurs, transformateurs et exportateurs n'en tirent pas encore le plein potentiel à cause d'un manque d'organisation et de collaboration qui les exposent davantage aux fluctuations du marché.

Les pêcheurs de homard, comme ceux de la région de Sainte-Anne-de-Kent, sont souvent témoins de paysages splendides lors de leurs sorties en mer.
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«Le rapport vise à mieux travailler ensemble et développer un plan qui est un peu plus orienté vers le marché», constate le directeur général du Conseil canadien du homard (CCH), Geoff Irvine.

Le CCH a d'ailleurs été formé il y a un peu plus d'un an pour réunir autour d'une même table les différents intervenants du secteur de la pêche au homard afin d'améliorer la mise en marché de la ressource. Il vise ainsi à combler un manque de dialogue qui ne date pas d'hier.

«L'industrie est fragmentée parce que, historiquement, c'est comme cela que ça c'est toujours passé dans le secteur de la pêche côtière. La pêche est séparée de la vente, ce qui alimente la controverse et la méfiance. Alors, nous devons travailler en collaboration et de façon plus transparente. Si nous pouvons y arriver, nous pourrons démolir ces murs», estime Geoff Irvine.

Le directeur général de l'Union des pêcheurs des maritimes (UPM), Christian Brun reconnaît lui aussi que le rapport a raison de souligner la fragmentation de l'industrie du homard et reconnaît que tous auraient intérêt à dialoguer davantage. Son organisme, qui représente plus de 1500 pêcheurs côtiers des maritimes, siège d'ailleurs au CCH, aux côtés d'autres associations de pêcheurs, mais aussi de représentants des transformateurs et des pêcheurs des premières Nations.

«Ça fait depuis 25 ans qu'on se parle très peu, remarque Christian Brun. C'est rendu très compétitif et puis l'industrie a dû passer à travers d'importantes difficultés qui ont opposé différentes régions les unes contre les autres. Les pêches ont passé à travers d'énormes défis au cours de la dernière vingtaine d'années et, même s'il y a eu certaines améliorations, il y a aussi eu beaucoup de défis. Alors, ça a mis les gens les uns contre les autres dans toute l'industrie, pas juste les pêcheurs, mais aussi les transformateurs. Ce sont plutôt les circonstances qui ont fait que c'est fragmenté.»

Le rapport note toutefois qu'en travaillant ensemble, les différents acteurs de l'industrie du homard pourraient améliorer la valeur du produit, ce qui permettrait à tous d'en tirer davantage de profits. Les consultants insistent en particulier sur la mise en marché et le marketing, d'autant plus que les consommateurs deviennent de plus en plus exigeants. C'est là un enjeu que l'UPM identifie elle aussi.

«Les consommateurs exigent de plus en plus la qualité et exigent de plus en plus de savoir comment le homard passe de la mer à l'assiette. Ils veulent savoir d'où il vient ce produit-là et exigent davantage qu'il soit pêché de façon durable. Alors, tout ça, il faut le démontrer de plus en plus», remarque Christian Brun.

Il faut donc accorder une plus grande importance à la communication, pour mieux faire connaître le homard canadien auprès des consommateurs. Le rapport conclut aussi qu'il serait dans l'intérêt de tous de percer de nouveaux marchés. Pour le moment, environ 80% du homard canadien est exporté vers les États-Unis, ce qui rend l'industrie vulnérable aux fluctuations du dollar et explique en partie la diminution des prix au cours des dernières années, puisque les États-Unis ont été durement touchés par la crise économique.

Le rapport recommande aussi de revoir l'exploitation du homard afin d'en améliorer la valeur. Les consultants estiment ainsi qu'un meilleur contrôle des débarquements est nécessaire afin de maintenir une offre plus constante et à un prix plus intéressant pour les pêcheurs.

«Il faut repenser les débarquements. Un des gros problèmes, c'est que l'industrie a du mal à gérer le volume des débarquements durant les deux périodes les plus actives de l'année. Si les transformateurs et les exportateurs ne peuvent pas le gérer, pourquoi tant de débarquements? Si nous sommes vraiment voués à la qualité du produit, nous devrions gérer les débarquements de façon plus réfléchie. Mais nous ne le faisons pas», constate Geoff Irvine.

Il reconnaît que ce constat est un peu plus controversé, puisqu'il relance un vieux débat sur le besoin de réorganiser, mais aussi de rationaliser la pêche. Les pêcheurs commencent toutefois à accepter cette critique et à reconnaître qu'il faut trouver un moyen de réduire le nombre de bateaux. Des efforts sont d'ailleurs déjà déployés en ce sens.

«Ça fait longtemps qu'on parle de réduire le nombre de pêcheurs d'un degré raisonnable, soit environ 10% ou 15%, pour permettre aux pêcheurs d'avoir un meilleur revenu. On est en train de mettre ça en oeuvre. D'ici le début de l'année prochaine, on souhaite que tout soit mis en place avec le programme de homard», explique Christian Brun.